"Y'a des choses qu'on voit pas à Rive-Noire, mais qu'on sent dans l'ombre et la brume." Le Vieux Francoeur, Historien local
Aah, Rive-Noire. Un p’tit village perdu entre la 45 pis la rivière des Outaouais. J’me rappelle encore de mes années de jeunesse là-bas, comme si c’était hier. La belle époque des gros chars, des cd players, pis des premiers jeux vidéos, mais à Rive-Noire, tout était un peu différent. On avait nos propre p’tites histoires, qu’on se racontait su’l bord d’un feu d’camp, quand le vent faisait grincer les branches des arbres pis que les ombres dansaient juste en dehors de ton champs de vision.
Tsé, Rive-Noire, c’est un village comme bin d’autres. Des vieilles maisons pittoresques, pis de nouvelles maisons un peu moins charmantes, mais pas mal plus confortables, des rue mal entretenues pis pas beaucoup de trottoirs, et le p’tit dep au coin d’la rue qui vendait 10 bonbons surettes pour 1 cenne, où bin des jeunes se retrouvaient après la p’tite école pour jaser. Mais y’a une lourdeur dans l’air à Rive-Noire, comme si l’orage était jamais bin loin, et ya des histoires, racontées par les vieux pis les jeunes, pis elles sont toutes vrais. Je l’sais, parce que quand j’étais jeune, j’écoutais moi. J’écoutais, mais je les ai vécu aussi. Quand on est jeune, on est pas mal plus courageux…
Le Lac-à-la-chandelle pis sa momie, la station de radio qui existe pas, l’eau rouge du 15 octobre, les soeurs enterrées, la vieille légende du draveur de la Rivière Noire? Toutes vrais. Et y’en a plein d’autres histoires comme celles-là à Rive-Noire, et je l’sais, parce que je les ai toutes vu, pis j’va vous les raconter, comme quand j’écoutais les vieux, pis leur version.
Y’a, au nord de Rive-Noire, bin creux dans les bois, un vieux couvent. Pas l’genre de couvent qu’on voit d’habitude, avec des murs de pierres pis des clochers, non. Celui-là, y’est différent. Y’est sous la terre en faite. C’est là que les Soeurs Enterrées vivaient, des religieuse qui avaient choisi de s’couper du monde, de s’barrer dans la noirceur, loin du soleil, loin du péché. Personne au village savait vraiment pourquoi elles avaient décidées de faire ça, mais une chose est sûre, y’avait quelque chose de pas très catholique qui s’passait sous la terre. L’entrée du monastère, c’tait juste une porte en bois cachée par des racines, comme si la terre elle-même voulait garder le secret. Pis à l’intérieur, c’était tout un réseau de tunnels qui descendaient toujours plus creux, plus sombres.
Y’avait pas grand monde qui s’rendait creux d’même dans les bois de Rive-Noire, et les seuls qui se rendaient là-bas, pour apporter des vivres aux Soeurs, revenaient jamais vraiment les mêmes.
Y’a des vieux qui disent que les Soeurs, elles étaient là pour expier quelque chose, qu’elles priaient jour et nuit pour des âmes qu’elles disaient perdues. Mais un jour, aux alentours de la fin d’la Grande Guerre, plus personne a entendu parler d’elles. Le couvent, y’a fermé ses portes, pis c’était comme si la terre elle-même les avait avalées. Pourtant, quand on s’promène près d’leur terre, on entend parfois le vent lui même porter des murmures de prières, des prières qui viennent du dessous.
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Mon histoire s’est passé l’été où on avait tous dix-sept ans, où y’avait pas grand-chose à faire dans Rive-Noire à part traîner autour du lac ou aller boire des bières dans les champs. On était six, cette soirée-là, à avoir décidé d’explorer les bois au nord du village, là où personne va jamais. C’était Simon qui avait eu l’idée, comme toujours. Lui, y’avait pas peur de grand-chose. Y’avait entendu parler du vieux couvent sous la terre, c’te place-là que personne approchait, pis il s’était mis en tête qu’on devait y aller.
"C’juste un vieux trou dans terre," qu’il disait, en éclatant d’un rire de dentiste. "Y’a rien là d’vantureux, c’est juste une histoire de vieux pour faire peur."
Mais moi, j’me souviens, même en marchant derrière eux avec ma lampe de poche, j’me sentais pas à l’aise. Tout le long du chemin, y’avait comme un froid dans l’air, même si c’tait le milieu de juillet. On avait tous un peu trop bu, on avait tous un peu trop d’assurance dans nos rires, mais chaque pas qu’on faisait dans les bois, j’sentais le silence se refermer autour de nous. On était presque arrivés quand Marco, qui marchait en tête avec Simon, a dit qu’il voyait quelque chose au loin. Une vieille porte en bois, presque cachée par les racines des arbres, comme si la nature avait essayé de la faire disparaître. Mais c’tait là. Exactement comme dans les histoires.
"Coudonc, c’est ben vrai," qu’il a dit, en approchant la main vers la poignée rouillée. Personne a dit un mot, mais on était tous là, autour de lui, attendant que la porte s’ouvre. Quand il l’a tirée, ça a fait un bruit, un grincement long, comme si c’était les os de la terre elle-même qui craquaient. Derrière la porte, y’avait un escalier. Des marches en pierre qui descendaient dans l’noir complet. On voyait rien au bout. Juste un trou béant, une invitation à la folie. Mais Simon, lui, il a pas hésité.
"Allez, bande de peureux, on va juste jeter un coup d’œil, pis on s’en va."
Il a allumé sa lampe, et on l’a suivi. Chaque pas qu’on faisait résonnait comme si les murs eux-mêmes nous écoutaient. L’air était humide, lourd, pis chaque respiration semblait plus difficile que la dernière. Les marches descendaient encore, toujours plus bas, plus profond que ce qu’on aurait cru. À un moment, on entendait plus rien à l’extérieur, même pas les criquets ou le vent dans les arbres. Y’avait juste ce silence étouffant, pis les semelles de nos bottes qui raclaient la pierre.
Après c’qui m’a paru une éternité, on est arrivés en bas. Y’avait un long couloir, avec des torches éteintes le long des murs, pis des portes de chaque côté, toutes fermées. On aurait dit une prison, ou quelque chose de pire. L’air sentait le vieux, la moisissure, pis autre chose, comme un parfum lourd, presque sucré, mais écœurant. Après c’qui m’a paru une éternité, on est arrivés en bas. Y’avait un long couloir, avec des torches éteintes le long des murs, pis des portes de chaque côté, toutes fermées. On aurait dit une prison, ou quelque chose de pire. L’air sentait le vieux, la moisissure, pis autre chose, comme un parfum lourd, presque sucré, mais écœurant.
“C’est icitte qu’elles vivaient?” a murmuré Julie, la blonde à Simon “Dans l’noir?”
Personne a répondu, mais on savait tous que oui. C’était là que les Sœurs Enterrées passaient leur vie, loin du soleil, loin du monde. Pis maintenant, c’tait nous qui étions là, à marcher sur leurs traces. Simon a décidé qu’on devait voir ce qu’y avait derrière une des portes. Il a choisi celle qui était au milieu du couloir. Elle était vieille, en bois craqué, mais c’était encore solide. Quand il a mis la main sur la poignée, j’vous jure, y’a eu comme un souffle d’air glacé qui nous a enveloppés. Un vent qui pouvait pas venir de nulle part, vu qu’on était sous terre, enfermés.
"Vous sentez ça?" a dit Marco, en reculant un peu. Oui, on le sentait. C’était pas juste l’odeur du vent, du renfermé et du moisi. Y’avait une odeur de soufre rance qui venait directement de l’autre côté d’la porte. Elle s’est ouverte sans un bruit, sans un effort malgré son âge et sa décrépitude. Derrière, c’était une minuscule pièce pis au milieu, y’avait quelque chose qui ressemblait à un lit en pierre, ou à un autel.
“C’est quoi ça, voyons…” a soufflé Julie, en s’avançant dans la pièce. Mais dès qu’elle a mis un pied à l’intérieur, y’a eu un son, un souffle.
D’abord, on aurait dit un murmure, quelque chose de lointains, mais ça devenait plus fort, comme si ça venait de partout et nul part à la fois. J’vous jure, ça chuchotait, juste assez fort pour qu’on comprenne pas les mots, mais assez pour nous glacer le sang. On s’est tous figés. Pis soudain, la porte s’est claquée d’un coup, avec Julie à l’intérieur.
On a crié, on a tous essayé de rouvrir la porte, mais elle bougeait plus. Y’avait rien à faire. On entendait Julie de l’autre côté, qui criait, qui pleurait, qui cognait contre la porte, mais le bruit des chuchotements devenait plus fort, comme si y’avait des dizaines, des centaines de voix qui s’emmêlaient, pis qui voulaient nous dire quelque chose. Pis alors, c’est arrivé.
Le silence. Plus un son. Plus un cri. Juste ce vide, épais comme la terre au-dessus de nos têtes. Quand on a finalement réussi à ouvrir la porte, Julie était là. Mais elle parlait plus. Elle bougeait plus. Elle était juste agenouillée, au milieu de la pièce, ses yeux fixés sur l’autel de pierre, pis elle murmurait des prières dans une langue qu’aucun d’nous connaissait. Simon l’a prise par le bras, essayant d’la faire sortir, mais elle a pas bougé. Elle était figée là, comme une statue vivante, pis elle répétait les mêmes mots, encore et encore, des mots qu’on comprenait pas.
Ça fait plusieurs années qu’on s’est sauvé du Couvent des Soeurs Enterrées maintenant. Mais Julie, est encore dans c’te pièce-là, à prier dans sa langue de pierre. Je saurais toujours pas dire si elle empêche le monde d’entrer dans le couvent, ou si elle empêche quelque chose d’en sortir.
Dans l’temps où l’village commençait à peine à prendre racine, la Rivière Noire c’tait déjà un pilier, un passage vital pour les bûcherons pis les draveurs. Jérémie Marchand, lui, c’était l’meilleur d’entre tous. Un géant d’force pis de courage, qui savait lire la rivière comme un livre ouvert. Mais dans l’fond, c’tait un cœur tendre, surtout pour une fille du village qui s’appelait Élise. Élise, c’était l’genre de femme qu’tout l’monde connaissait. Elle avait l’âme douce, le sourire d’un ange, pis elle portait toujours un foulard bleu qu’elle disait chanceux. Elle attendait chaque soir son Jérémie avec un amour qu’on pouvait voir de loin. Y’avait que lui, pour elle. Elle savait qu’à la fin d’la saison, ils bâtiraient enfin leur avenir ensemble, une maison près de la rivière, des enfants qui courraient dans les bois. Elle y croyait fermement, Élise, pis son sourire pouvait rendre lumineux même les jours les plus sombres.
Mais un printemps, quand la Rivière Noire était plus capricieuse qu’à l’habitude, un accident est arrivé. C’était un de ces jours où l’eau grondait plus fort que d’ordinaire. Les draveurs s’étaient installés près du pont du village, pis Élise, elle était venue regarder, comme elle aimait faire, pour voir son beau Jérémie à l’œuvre. La rivière, elle était vivante, forte, pis les hommes, y savaient qu’elle leur était à la fois indispensable et dangereuse. Pis pourtant, Élise, elle s’est approchée d’un peu trop près. Les draveurs, ils ont pas vu c’qui s’est passé exactement. Y’a juste eu un cri, un glissement sur les rochers, pis l’foulard bleu d’Élise qui s’est envolé dans l’air comme un oiseau blessé. Elle est tombée dans l’eau, elle a été emportée si vite que Jérémie, pourtant le plus rapide de tous, a pas eu l’temps d’la sauver. Les flots l’ont prise, l’ont cachée sous leur surface, pis d’un coup, c’tait le silence. Juste l’eau noire qui couvrait son secret.
Jérémie a passé des jours à la chercher. Il a arpenté chaque rive, fouillé chaque recoin d’la rivière, jour et nuit, sans jamais vouloir accepter l’idée qu’elle était partie. Les villageois, ils ont tous compris qu’il avait perdu plus qu’un amour; il avait perdu sa raison d’vivre. Sa voix a commencé à s’effacer, son regard est devenu fixe, pis ses gestes lents. Il traînait son corps sur les bords d’la rivière comme une ombre, l’air perdu, l’air enchaîné par le regret.
C’est à partir de là qu’les histoires ont commencé. Quelques semaines après la noyade, des pêcheurs disaient qu’ils avaient vu des mouvements étranges su’a rivière, des remous qui suivaient aucun courant naturel. Des chuchotements dans l’air, comme si la rivière elle-même murmurait quelque chose, l’âme en peine d’Élise qui s’tourmentait toujours dans l’eau. Une nuit d’automne, un vieil homme d’la scierie, qu’avait dormi près d’la rive, a juré qu’il avait vu une silhouette pâle, les cheveux longs, mouillés, pis les yeux vides, qui errait sur la rivière, flottant entre les flots comme une apparition. Y’avait quelque chose de solennel, de terrifiant dans sa manière d’se mouvoir, mais elle avait l’air douce aussi, comme une prière qu’on aurait dit à voix basse.
Quand Jérémie a entendu ça, ça l’a achevé. Lui qui se levait encore à chaque lever d’soleil, espérant voir Élise revenir, a senti comme un feu s’éteindre dans son cœur. Pour lui, si Élise errait vraiment dans l’fond des eaux, c’était qu’elle l’attendait, qu’elle l’appellait. Une nuit sans lune, il a pris sa vieille lanterne pis son pique pour traverser les rapides, pis il est parti tout seul. Il voulait la rejoindre, peu importe ce qu’y fallait faire, même s’il fallait laisser sa propre vie. Les draveurs qui ont veillé tard l’ont vu s’aventurer seul su’l’eau. Ils ont tenté d’le rattraper, mais Jérémie avait ce regard fixe, ce regard qui vous dit qu’y’a rien qui pourra le faire changer d’idée. Il a glissé sur les billots, dansé entre les troncs, ses pas sûrs malgré la noirceur. Pis au bout d’un moment, il a disparu dans la brume de la rivière, laissant juste la lueur de sa lanterne qui s’éloignait, s’éloignait jusqu’à ce que la noirceur elle-même l’avale.
On a plus jamais revu Jérémie. Certains disent que la rivière l’a pris lui aussi, qu’il a rejoint Élise pour danser éternellement dans les profondeurs. Mais y’a ceux qui disent autre chose. Qu’à chaque année, à la même date où Élise a disparu, on peut voir deux silhouettes marcher côte à côte sur la rivière. Un homme grand, fort, avec des yeux tristes, tenant la main d’une jeune femme aux cheveux longs, un foulard bleu autour du cou.Ces deux-là, ils s’balancent doucement au rythme des flots, comme s’ils dansaient pour la dernière fois.
Y’a ben des raisons pour lesquelles les vieux vous disent de pas aller s’promener seul dans les bois autour de Rive-Noire. Surtout quand la brume descend, qu’le vent tombe, pis qu’le silence s’installe comme un drap lourd. Parce que quand tout devient trop calme, ben y’a des choses qui se réveillent. Cette soirée-là, Étienne, Charlotte pis Louis, y’ont décidé d’partir explorer un vieux sentier, un chemin à moitié caché, pas loin du lac, mais trop loin pour que les rires des touristes leur donnent du courage. C’était Étienne le leader. Vous voyez l’genre : le gars costaud, trop têtu pour admettre qu’il pourrait bien être en train de faire une grosse bêtise. Charlotte le suivait d’près, avec cette p’tite fierté qui l’empêchait d’le laisser aller seul. Pis Louis, lui, il était là juste pour montrer qu’il avait pas peur, même si ses yeux jetaient des coups d’œil nerveux aux ombres des bois.
Ils avancent comme ça, entre les arbres, les rires un peu forcés, pis les branches qui craquent sous leurs pieds. Mais plus ils avancent, plus le sentier devient étroit. Les arbres se rapprochent, tordus pis anciens, comme si la forêt elle-même voulait les emprisonner là. Ils rigolent un peu moins, les trois jeunes, pis à un moment donné, Charlotte chuchote : “Vous trouvez pas que c’est trop calme? J’entends même plus d’grenouilles.”
Louis hausse les épaules, mais on voit bien dans son visage qu’il est inquiet. Ils font encore quelques pas, pis là, Étienne s’arrête net. Il s’accroupit pis y pointe du doigt. Par terre, y’a des marques étranges, comme des griffures. Pas des marques d’ours ou de lynx, non. C’est comme si quelque chose avait traîné là, avec des doigts bien trop longs ni bête, ni humain. Étienne part à rire pour se donner un peu d’courage : “Ça doit surement être un raton laveur géant!” Y rit, mais Louis, lui, y’a pas l’air trop rassuré. Pis juste comme il ouvre la bouche pour suggérer d’faire demi-tour, y’a un bruit, un chuchotement, venu d’quelque part plus loin dans les bois. C’est pas le vent, ça non. C’est plus bas, comme une sorte de respiration lente, étouffée, accompagnée d’un froissement de feuilles qui semble s’rapprocher.
Étienne, en chef qu’il est, avance encore d’un pas, pis ils découvrent un espace dégagé, où les arbres s’écartent soudainement. Dans c’te clairière-là, la brume est encore plus épaisse, pis en plein milieu, y’a une masse sombre. C’est une silhouette, vaguement humaine, mais trop grande, trop maigre, avec des membres étrangement longs pis tordus. Sa tête est penchée, comme si elle écoutait, comme si elle sentait leur présence. Sa peau, elle est d’un gris pâle, un gris de cadavre, pis elle brille faiblement dans la lumière du crépuscule. Charlotte étouffe un cri, mais Louis lui pose une main sur la bouche. Ils veulent pas qu’elle les remarque, c’te chose-là. Parce qu’elle bouge lentement, elle tourne sa tête, comme si elle cherchait. Ses yeux, enfin, s’ouvrent lentement : deux orbes d’un noir pur, si noirs qu’on dirait des trous, comme si elle pouvait voir jusqu’au fond de leur âme.
Étienne essaie de faire un pas en arrière, mais un craquement d’branche sous son pied résonne dans le silence. La chose se tourne brusquement vers eux, ses yeux noirs les fixant, immobiles. C’est là qu’ils la voient bouger pour la première fois vraiment : chaque mouvement est saccadé, comme un pantin mal attaché. Pis elle s’approche. Elle ouvre la bouche, mais y’a pas d’langue, juste un trou béant, noir, qui laisse échapper un râle profond, un murmure qui semble dire : “Viens… approche…”
Pris d’panique, Étienne crie : “Courez!”
Y s’rendent même pas compte qu’y sont déjà partis en courant, les trois, sans regarder en arrière. Mais la chose, elle s’met à les suivre, chaque pas saccadé résonnant dans la forêt comme un battement de tambour. Pis là, c’est plus juste le bruit d’la forêt, c’est un gémissement qui semble monter de partout, comme si les arbres eux-mêmes chantaient cette mélodie funèbre.
Ils courent, les souffles coupés, les jambes en feu, mais peu importe la vitesse, ils sentent encore sa présence, toujours aussi proche, comme si elle flottait juste derrière, chaque murmure de “Viens… approche…” perçant leur esprit. La forêt, elle les enferme. Chaque branche qu’ils frôlent laisse une trace rouge sur leurs bras, pis leur vue devient floue.
Pis soudainement, tout s’arrête. Y’a plus un bruit dans la forêt, à part le pas de course des jeunes. Étienne s’arrête d’un coup, haletant. Il regarde autour, perdu. Charlotte est là, les pliée en deux, rattrapant son souffle, mais Louis il est plus là. Mais dans le silence, un murmure se fait attendre, un murmure qui sonne vraiment comme Louis… Un murmure qui semble dire : “Viens… approche…”